Amélie Mansfield

[Volume III, pp. 92 - 93]

LETTRE XCV



Adolphe à Ernest


Dresde, 13 Septembre.

[p. 92] Hier, sur votre recommandation, je fus chez le Comte de Lunebourg; il venait de partir en chaise de poste; j'imagine qu'il a été vous joindre à Vienne: je devrais peut-être m'étonne qu'il n'ait pas daigné me dire un mot de son départ; mais j'apprends chaque jour que dans ce monde, où le rang et la richessse sont comptés pour tout, celui qui est pauvre et obscur doit s'attendre à être compté pour rien.

Ernest, il est vrai qu'il a eu entre votre mère et moi une explication qui nous a séparés pour jamais: je n'ai pu supporter d'être insulté: je ne le supporterais pas même de vous, qui m'êtes plus cher que la vie. Si je croyais que le récit de cette scène pût être utile à votre bonheur, je n'aurais pas [p. 93] attendu jusqu'à ce jour à vous et adresser les détails, mais cette connaissance ne pourrait que vous nuire; fiez-vous à moi, mon ami, et pour quelque tems encore laissez-moi garder le silence.

Vous me connaissez assez pour être sûr que ce n'est ni la crainte, ni des menaces que je méprise, qui m'éloignent de vous; et moi je vous estime assez pour être sûr que, malgré les calomnies de la méchanceté et les prétentions de l'orgueil, vous verrez toujours dans votre ami, un honnête homme et votre égal.


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Page Last Updated 11 April 2004